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Article de Var-Matin du 25 octobre – « Abus sexuels dans l’Eglise : une journée pour en parler »

Pour lutter contre les abus sexuels, cette église du Var appelle au jeûne et à la prière

PAR CATHERINE PONTONE Mis à jour le 25/10/2018 à 08:14 Publié le 25/10/2018 à 08:14

 

Vendredi 26 octobre, en l’église Saint-Jean à La Valette, le père Arnaud Adrien et le père Loys organisent une journée de prière et de jeûne lutte contre les abus, et notamment contre la pédophilie.

 

« Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui. » Ainsi, débute la lettre du pape François du 20 août adressée à tous les catholiques du monde, sur les crimes d’abus sexuels au sein de l’Église. »Ces paroles de saint Paul résonnent avec force en mon cœur alors que je constate, une fois encore, la souffrance vécue par de nombreux mineurs, commis par un nombre important de clercs et de personnes consacrées, écrit le pape.Un crime qui génère de profondes blessures faites de douleur et d’impuissance, en premier lieu, chez les victimes, mais aussi chez les proches, et dans toute la communauté, qu’elle soit composée de croyants ou d’incroyants » (…) En réponse à cet « engagement de l’Église dans cette lutte contre les abus, et notamment contre la pédophilie« , la paroisse Saint-Jean invite, vendredi, la communauté à venir participer à la journée de jeûne et de prière.Rencontre avec le père Arnaud Adrien, curé de la paroisse Saint-Jean et le père Loys de Saint-Chamas qui, à chaque heure de la journée de vendredi, liront un texte sur les victimes dont « la dignité a été niée », et en ne pouvant approcher « cette souffrance qu’avec un infini respect ».
Pourquoi cette journée de jeûne et de prière ?
Père Loys de Saint-Chamas :C’est le pape qui a demandé aux paroisses de faire une journée de prière et de pénitence pour toutes les victimes des abus sexuels.
La parole des victimes se libère. Comme le vivez-vous en tant que prêtre ?
Père Loys de Saint-Chamas : Ces comportements qui sont aujourd’hui condamnés, nous les avons toujours condamnés. L’Église a toujours considéré que c’était mauvais.Mais il y a eu des silences…
Père Loys de Saint-Chamas : Le silence ne porte pas sur le fait qu’on a dit que c’était mal, mais sur le comportement à l’égard des fauteurs. On a, peut-être, examiné la faute comme étant celle d’une personne qui est un adulte, responsable, mais on n’a pas assez fait attention aux conséquences du péché. Et donc, à l’effet sur les victimes.Père Adrien : Nous n’écoutions pas assez les victimes.Vous avez sélectionné le témoignage d’une victime d’attouchements à 13 ans et demi, et disant « s’être sentie abandonnée par Dieu… et par l’Église quand elle a essayé à plusieurs reprises d’en parler aux adultes »…
Le père Loys de Saint-Chamas : La prise en charge, l’accueil au sens de porter un soutien de reconstruction était quasi nulle. Alors qu’on apportait le soutien pour un certain nombre de gens atteints de différents maux, là… (silence).

Comment avez-vous réagi lorsque ces affaires de pédophilie et de crimes d’abus sexuels ont été révélés au grand jour ?
Père Adrien : Ces affaires mises sur la place publique obligent les responsables à traiter sans aucune réserve les situations de ce genre : ne rien cacher. Le fait que cela soit mis en lumière va permettre une purification dans l’église, une gestion totalement différente de ces affaires-là. Elles seront totalement différentes avec le souci premier de protéger les victimes.

Père Loys de Saint-Chamas : Les Chrétiens le demandent. Nous sommes heureux de cette mise en lumière. Heureux, dans le sens que les victimes soient écoutées. C’est la reconnaissance publique de la faute qui rassure la victime et, qui lui fait comprendre qu’elle n’est pas responsable. Le fait qu’on ne cache pas la libère elle-même.

Les fidèles abordent ce sujet avec vous…
Le père Adrien: Oui, nous en parlons. Tous ces drames datent depuis 1945. Mais la révélation arrive d’un coup. Cela fait masse.

Cette journée de prière trouve d’autant sa légitimité…
Père Loys de Saint-Chamas : Le fait qu’on fasse une journée comme cela va aider certains à parler davantage. Parce qu’il y a, du côté des fidèles, encore une réserve profonde, une peur de blesser trop.

Ce sont des actions mauvaises, cela fait du mal à celui qui le fait, et cela en fait encore plus à celui qui subit. Ce mal est proportionnel à ce qu’on attend du prêtre. C’est encore pire quand c’est un prêtre.

Pourquoi ?
Père Adrien : Parce qu’on attend l’inverse du prêtre. C’est un drame parce qu’il y a un fond de confiance au départ.
Père Loys de Saint-Chamas : Il y avait une confiance, mais on fait quelque chose qui la piétine sans qu’on le voit tout de suite. D’où le choix du témoignage de Véronique Garnier, extrait de la revue du Rosaire du diocèse de Lourdes que nous avons joint au dossier remis aux fidèles. Elle dit qu’elle a eu à se pardonner. C’est là qu’il y a une perversion. L’abusé est mis dans une position où il a l’impression qu’il est consentant.

Père Adrien : c’est là où il y a l’abus de pouvoir, de conscience. C’est un drame terrible que des prêtres aient pu faire cela. Pour moi, il est témoin de Jésus Christ, et là il est le contraire de tout cela. Il y a un contre-témoignage terrible.

Ces abus à répétition peuvent-ils remettre en cause le vœu de célibat ?
Père Adrien : Le célibat n’a rien à voir avec la pédophilie. Si cela pouvait remettre en cause le vœu de célibat, il faudrait que cela remette en cause la structure familiale. Pourquoi ? Parce que l’immense majorité des actes pédophiles ont lieu dans les familles : ce sont les papas, les oncles, les grands frères… Ce n’est pas lié au célibat. C’est une structure psychologique qui doit être soignée.

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